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Les organisations syndicales de la DDFIP des Alpes-Maritimes se sont rendues ce 10 septembre 2020 à la deuxième convocation d’un Comité Technique Local dont elles avaient boycotté la première session (fixée au 3 septembre).

L’ordre du jour était chargé, mais nous avons décidé à l’unanimité de ne pas siéger à cette nouvelle parodie de dialogue social, puisqu'une fois encore, aucunes véritables négociations n'y seraient possibles.

Avant de quitter la séance, nous avons tout de même lu une longue et offensive déclaration liminaire afin de nous exprimer sur l’ensemble des points de l’ordre du jour, expliquer la raison de notre boycott, et distribuer quelques tacles.


L’ordre du jour de la réunion :

La déclaration liminaire (également téléchargeable en pdf à la fin de la publication) :

 

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CTL DU 10 SEPTEMBRE 2020

DÉCLARATION LIMINAIRE INTERSYNDICALE

 

Monsieur le président,

Nous sommes convoqués aujourd’hui à une énième chambre d’enregistrement à laquelle nous avons décidé de ne pas siéger.

Plusieurs raisons à cela.

Tout d’abord, la plupart des sujets à l’ordre du jour sont périmés. Certes, la crise sanitaire est passé par là et l’urgence d’alors n'était pas de réunir le Comité Technique Local, mais quand bien même.

De plus, la majorité des points abordés dans les CTL ne sont plus soumis à un avis puisque bien souvent il ne s’agit que d’informer les représentants des personnels.
Et pour les points qui sont soumis à un vote, les marges de manœuvres sont plus que limitées et pour tout dire souvent inexistantes.

Les suppressions d’emplois ? Elles viennent d’en haut.

Les fusions et réorganisations ? Pas négociables.

Les changements qui affectent la façon de travailler des services ?
Des expérimentations sont mises en place, mais elles sont conduites de la même façon que celles de la DG et nous savons avec l’expérience qu’elles n’ont d’expérimentation que le nom et qu'à leur terme la généralisation fait loi.
Quels qu’en soient les résultats !
Au mieux, localement, nous sont promis des points d’étape, des feedback ou encore des réunions pour ajuster certains détails. Mais tout cela reste bien souvent à l’état de promesses.

Ainsi marchent notre direction, la direction générale, le ministère, la Fonction Publique, et nos politiques, portés par leurs dogmes et sans jamais regarder le peuple d'en bas.

Pourtant, les différents baromètres publiés sans honte (et sans commentaire puisqu’ils leur donnent tort) par la DG montrent tous que le moral des personnels est en berne.

Démotivation, sentiment d’inutilité, manque de perspective, que ce soit dans le travail ou en termes de carrière. Mais qu’importe, du moment qu’on fait des économies…

Le moral des troupes, une chose que vous vous êtes bien gardé d'aborder, monsieur le directeur, lors de votre petit discours de bienvenu prononcé pour clore la présentation de notre direction à l'accueil des nouveaux du 1er septembre dernier.

Vous avez surtout parlé de fierté de servir au sein d'une grande administration. Nous ne vous contredirons pas sur ce point.

Mais vous avez aussi parlé de la diversité des métiers et des perspectives de carrière. Sur ce point, il est grand temps de remettre votre logiciel à jour.

Le démantèlement programmé, progressif mais inéluctable de notre administration est en route. Bientôt, des missions seront certainement bradées au privé, à d'autres organismes d’État ou encore à l’intelligence artificielle et nous finirons par ne plus en garder que la portion congrue.

Les perspectives de carrière ne sont également pas aussi idyllique que vous le prétendez. Les plans de qualification se réduisent d'année en année comme peau de chagrin.

Pareillement, avec les nouvelles règles de mutations, nationales comme locales.

L'opacité dans laquelle sont élaborés les mouvements depuis que la compétence des CAP a été remise en cause, mais également les petits bricolages malsains de la centrale en termes d'affectation des stagiaires, font que les mouvements de mutations deviennent de plus en plus incertains pour ceux qui ne voudraient pas sacrifier leur vie de famille ou leur cadre de vie pour une promotion ridicule en termes de salaire qui les mettraient dans le rouge en cas de double résidence.

Les nombreux agents, qui renoncent chaque année aux différents concours parce qu'ils se retrouveraient éloignés de leurs enfants, sans garantie de les retrouver l'année d'après, alors même qu'ils bénéficient de priorités, en sont témoins.
Aujourd'hui, il faut être célibataire et sans attache pour adhérer à votre discours.

Au-delà du peu de cas qu'il est fait de l'avis des organisations syndicales, une autre raison pour laquelle nous refusons de siéger aujourd'hui tient précisément aux points de l'ordre du jour qui traitent du démantèlement de notre administration, qui a été validé de force en 2019.

Mais nous reviendrons sur ce sujet un peu plus tard.

Exit pour nous donc le sujet du budget « prévisionnel » 2020. Budget en baisse constante depuis de nombreuses années et obligeant la direction et les services à des numéros d’équilibristes pour continuer à fonctionner.

Exit également le sujet de la formation professionnelle. 2019 est trop loin pour en faire un bilan. Et comment parler de « perspectives » pour 2020 alors que nous sommes en septembre.

De même, la fusion des SPF est actée et effective, au moins physiquement, l’informatique suivra.

Les horaires et les modalités d’accueil du public de Cadeï et de Thiers quant à eux, n'en sont plus au stade de l’expérimentation puisqu’ils sont effectifs également.

En effet comment peut-on parler raisonnablement d'expérimentation dans le contexte du confinement et des restrictions imposées lors des premières phases du déconfinement ? En cela, la crise vous aura bien aidé.

Nous déplorons également que la DDFIP valide des conditions de travail inacceptables pour le vigile de Thiers puisque ce dernier travaille sans interruption entre 9h et 15h.

Un mot tout de même sur l’accueil du public.

Il est indéniable que l’utilisation du numérique a fortement augmenté ces dernières années. Mais est-ce une raison pour laisser tout un pan de nos concitoyens livrés à eux-mêmes face à une matière complexe et rébarbative ?

Malgré la réalité concrète du terrain et les besoins affirmés de nos concitoyens, l’accueil et le renseignement du public continuent à être traités de manière dogmatique par la DGFiP, en faisant fi des réels besoins des contribuables.

Et ceci est clairement assumé tant par l’administration que par le gouvernement.

Tout est fait pour écarter le public de nos locaux : fermeture des services, suppression progressive des plages de réception, mise en place et généralisation de l’accueil sur rendez-vous, obligation au télépaiement et à la télédéclaration… ne cherchons pas de logique dans cette démarche, elle demeure comme nous l’avons dit purement idéologique et dogmatique.

Elle a comme unique objet, sous prétexte du développement d’internet, de diminuer la présence territoriale de la DGFiP et donc d’accompagner (ou de devancer…) les suppressions d’emplois et la baisse des dotations budgétaires.

Malheureusement, les faits sont têtus, et la situation actuelle le prouve. Le public est attaché à un accueil réactif et spécialisé. Il veut et a besoin d’un accompagnement au plus près de ses attentes.

Il veut pouvoir trouver près de son domicile, un agent technicien et disponible, proche de ses préoccupations et avec qui il va pouvoir échanger en toute quiétude et sérénité. Par conséquent, nous ne pouvons que déplorer la précipitation de l’administration sur ce sujet sensible.

Avant de passer au tout numérique et de « forcer » nos concitoyens à utiliser des outils technologiques qui ne sont maîtrisés que par une partie de la population, il aurait été plus judicieux d’analyser le vrai besoin des contribuables et de leur proposer (pas d’imposer..) les modalités d’accueil adéquates.

Et l’accueil sur rendez-vous n’est pas l’unique réponse à ces problèmes. Ni pour le public, ni pour les agents.

Sur l’APRDV, plusieurs directions souhaitent continuer à développer ce mode de réception, mais se trouvent face à des difficultés de mise en œuvre : problèmes matériels d’agencement des locaux, problèmes organisationnels par un manque d’agents pour assurer à la fois un accueil immédiat et un accueil sur RDV. Ce que nous dénonçons.

Il ne suffit pas de vouloir imposer l’accueil sur RDV, encore faut-il tenir compte de la volonté des usagers, de leurs besoins et de la réalité du terrain.

Et pourtant, dans son Contrat d’Objectifs et de Moyens, l’administration déclarait vouloir améliorer l’accessibilité et la qualité des services publics, ainsi que la relation de proximité avec l’usager. Comment ne pas être d'accord avec cet objectif ambitieux…

Sauf que les orientations qui sont proposées sont bien à l'opposé de la conception d’un vrai accueil de proximité. Dans son projet, la DG demeure ainsi et malheureusement dans la pleine continuité des actions et des décisions prises ces dernières années.

En ce qui concerne les Établissements France Services, conséquence du NRP et de la fermeture de nos trésoreries quand il ne s'agit pas carrément de Centres des Finances Publiques, vous vous voulez résolument optimiste, en tout cas en façade, restituant au mot près les éléments de langages de la DG et de nos ministres, essayant de nous faire croire qu'il s'agit là d'une grande avancée en termes de présence de nos services sur le territoire et d'accès à notre administration.

Mais la réalité est tout autre et vous le savez bien :

Les EFS c'est quoi : un agent polyvalent (et non issu de notre administration) qui servira de point d'entrée à la DGFIP et à de nombreux autres organismes.

Notre direction quant à elle, se rendra dans ces Espaces à raison de deux demies journées par semaine, seulement en période d'échéances, périodes non encore déterminées précisément.
Pour le reste, visio et rendez-vous téléphoniques sont proposés.

Bref, comme nous avons pris l'habitude de le qualifier, du service public low-cost qui ne répondra absolument pas, à quelques exceptions près (notamment pour les QPV et Plan du Var), aux besoins réels du public.

Tout ceci imposé sans concertation, du moins pas comme nous l'entendons et comme la définition du mot le laisse supposer.

Les consultations d'ampleur organisées par les intersyndicales locales courant 2019 ont d'ailleurs toutes unanimement rejeté les premiers projets.

Ainsi, pour le département des Alpes-Maritimes, lors d'une votation organisée à l'automne 2019, 91,25 % des agents qui y ont participé se sont prononcés pour le retrait du projet prévu dans notre direction locale (7,24 % contre le retrait et 1,51 % votes nuls).

Idem avec les représentants des personnels, puisqu'il est évident que depuis le début aucune de nos remarques et de nos revendications n'ont été prises en compte tant au niveau national que local.

Les rares aménagements que vous avez apportés à la deuxième mouture de votre projet n'étaient guidés que par des considérations et des contraintes immobilières.

Quant aux élus locaux, ici comme ailleurs, leur avis n'a pas été plus pris en compte.

Sur tout le territoire national, des centaines de délibérations prises par les conseils municipaux et les conseils communautaires, pour s'opposer à la fermeture de leur service de proximité, SIP ou trésorerie, ont été balayées d'un revers de main.

Localement, vous avez parfaitement su jouer votre rôle de VRP des réformes pour endormir les moins méfiants à l'aide de cartes où une myriade de nouveaux points de contact apparaissent comme par magie, afin d'obtenir l'assentiment des élus locaux, leur faire avaliser cette nouvelle organisation, et de fait, leur faire porter la coresponsabilité de ce nouveau recul du service public.

De nombreux titres de la presse régionale se sont emparées du sujet et ont en grande majorité dénoncé cet abandon du service rendu au public.

Autre sujet, le recours de la direction à des emplois contractuels.

Certes vous nous répondrez que cette possibilité vous est donnée pour combler les vacances d'emplois après le dernier mouvement de mutation.

Pourtant, un appel à la liste complémentaire participerait tout naturellement à ce comblement. Et ces vacances n'existeraient pas si le recrutement par concours répondait ainsi aux besoins des services.

Mais ce n'est pas la solution qu'a choisi notre Direction Générale et vous vous êtes donc engouffrés dans la possibilité de recruter ces CDD qui ne resteront que 6 ans maximum à la DGFIP.

Enfin nous ne pouvons nous empêcher d'évoquer le mail adressé à tous les agents de la DGFIP par le Secrétariat Général du ministère, lundi 7 septembre dernier.

La nouvelle ministre de la Fonction Publique, pardon de la « transformation » de la fonction publique, terme pudique utilisé pour ne pas employer les mots destruction ou démantèlement, la nouvelle ministre donc, Amélie de Montchalin, figure de l'ultra libéralisme jusqu'au bout des doigts, nous demande gentiment, au prétexte d'accompagner efficacement le plan de relance du gouvernement, je cite : « de proposer toute idée qui permettra de simplifier l’action publique au quotidien ».

En d'autre termes, on demande aux agents s'ils ont des idées afin de scier la branche sur laquelle ils sont assis…

Ubuesque.

Ce n'est pas sans nous rappeler l'appel aux dons envoyé par son prédécesseur, Gérald Darmanin, afin de sauver les entreprises au printemps dernier…

Plutôt que de rétablir des impôts justes et égalitaires qui permettraient de faire fonctionner le pays, on préfère accélérer et accentuer les réformes qui concourent à créer encore plus d'inégalités.

Et tout cela est à l'image du plan de relance annoncé par le gouvernement. Un plan dont une grande partie des fonds servira à faire de nouveaux cadeaux aux entreprises, sans en exiger aucune contrepartie en termes d'emplois, afin de maintenir sous perfusion un système déjà à bout de souffle.

Plan qui ne sera pas financé par le rétablissement d'un impôt plus juste mais par les gains hypothétiques engendrés par une croissance future.

Formidable programme quand tout le monde sait pertinemment que ce modèle ne fonctionne plus, y compris les spécialistes qui font autorité en matière de macroéconomie.

L'autre levier pour financer ce plan, cela a été annoncé clairement et c'est en droite ligne avec les coupes déjà engagées ces dernières années, se fera sur le dos des services publics et de ses usagers, de la Fonction Publique, de ses emplois, de ses perspectives d'évolution en matière de carrière ou de négociations salariales.

Sachant cela, nous espérons bien qu'aucun agent de notre administration ne souhaitera participer à sa propre liquidation.

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pdfDéclaration liminaire intersyndicale