Monsieur le Président,

 

Le 22 octobre dernier nos organisations syndicales nationales signaient un protocole prétendant reconnaître l’engagement professionnel des agent.es.

Conscientes de l’essence de cet « objet politique et électoraliste », des limites et pièges d’une démarche entachée originellement de divers « chantages » et « pressions calendaires » exercés pour parvenir rapidement à un accord ; nos O.S ont su néanmoins faire évoluer ce dispositif (composé de trois volets) au terme d’un dialogue social pourtant contraint. Elles sont ainsi parvenues à faire en sorte que la prime proposée bénéficie au plus grand nombre et notamment à celles et ceux qui en avaient le plus besoin.

En matière de rémunération comme en matière de promotions internes, nous revendiquons toujours des mécanismes de revalorisation et d’augmentation des volumes plus pérennes.

Est-il besoin de rappeler en cette période inflationniste majeure et en l’absence de toute revalorisation réelle du point d’indice depuis 2010 (si l’on excepte les deux micro-retouches de 2016 et 2017) combien les fonctionnaires que nous sommes se sont paupérisés ces dernières années ? Ce ne sont pas les timides annonces du nouveau Ministre de la Transformation et de la Fonction Publiques, mardi dernier qui seront de nature à nous tranquilliser en la matière.

Bien au contraire son annonce d’une très insuffisante revalorisation de 3,5 % du point d’indice résonne comme une nouvelle véritable provocation.

3,5 % c’est près de deux points inférieur à l’inflation record que nous connaissons cette année. Une telle mesure implique donc que, malgré les promesses et artifices de la communication politique déformante de ces derniers mois, le gouvernement valide bel et bien une nouvelle dégradation du pouvoir d’achat des fonctionnaires. Globalement c’est déjà plus de 15 % de notre pouvoir en achat qui a été perdu en 12 ans et cette nouvelle détérioration n’est plus tolérable.

Nous ne reviendrons pas sur l’aspect tout aussi provoquant des déclarations de M. Guerini qui présente de façon éhontée cette insuffisante revalorisation du point d’indice comme un geste de « reconnaissance » de notre travail en faisant ainsi passer pour « un cadeau » ce qui était et doit rester un dû !

 

Avec (au sein de notre administration notamment) des promotions internes en berne et un gouvernement qui paradoxalement s’étonne du manque d’attractivité de la fonction publique, les deux premiers volets de ce protocole, aussi timides, limités et imparfaits soient-ils, répondaient (certes très insuffisamment) à des besoins élémentaires et à de vraies nécessités. Et c’est ce qui explique que malgré la conscience aiguë que nous avions des travers d’un dispositif ponctuel, financé de surcroît par les « économies » dégagées par les restructurations et pertes d’emplois que nous subissons, nos organisations syndicales nationales respectives ont signé ce protocole.

En revanche, le troisième volet de ce protocole a été décrété unilatéralement par la DG comme une mesure répondant à une nature différente de préoccupations : l’amélioration du « cadre de vie au travail ».

Nous tenons à l’affirmer ici fermement et sans la moindre ambiguïté : il ne saurait être question pour nous de prétendre que les besoins en matière de « cadre de travail » sont inexistants tant nous déplorons l’absence de VÉRITABLES espaces détentes, tant nous dénonçons l’inconfort notamment thermique de certains de nos sites, tant nous déplorons leurs équipements énergivores, tant nous constatons quotidiennement des environnements professionnels dégradés…

Néanmoins, nous estimons qu’en la matière, alors que Paris s’apprête à perdre près de la moitié de ses implantations dans le cadre du déploiement du Nouveau Réseau de Proximité (NRP), la priorité aurait été de commencer par préserver nos sites (au premier rang desquels ceux équipés de restaurants administratifs) plutôt que de réaménager ceux qui seront massivement densifiés. Voilà en quoi aurait déjà, de notre point de vue, consisté une réelle préoccupation pour les conditions de travail et le cadre de vie des agent.es de la DRFIP. Elles et ils comprennent aujourd’hui très mal qu’on leur propose des plantes vertes, des ballons ou des gourdes alors qu’ils n’auront plus demain de local d’archives ou de véritables cantines pour se restaurer décemment. La réduction du nombre de m² alloué à chaque agent·e découlant mécaniquement de la mise en œuvre du NRP reste en effet très loin de s’inscrire dans une démarche visant à l’amélioration du cadre de vie.

Par ailleurs les instrumentalisations, intimidations, contraintes et autres formes de dérives en tous genres n’ont pas manqué d’émailler plus spécifiquement encore la gestion de ce troisième volet et nous ne sommes pas dupes des véritables pièges qui nous ont été tendus.

En effet, si les deux premiers volets ont été négociés nationalement, il a été décidé pour le dispositif « cadre de vie », d’allouer une enveloppe budgétaire proportionnelle à la taille de chaque Direction locale à charge pour elle d’organiser, dans un cadre qui se devait d’être « participatif », une consultation des agent.es visant à élaborer des projets d’amélioration de leur environnement  professionnel.

 

Nous n’avons pu que déplorer et dénoncer les nombreux obstacles qui se sont dès lors cumulés avec, pour n’en énumérer que quelques-uns :

  • Les contraintes temporelles dictées par des exigences électoralistes : en effet la « participation » des agent.es devait être achevée en 15 jours en décembre  2021, afin de permettre une rapide réalisation des études de faisabilité et une présentation aux représentants des personnels consultés en bout de course avant les élections présidentielles. Le tout mené avec une volonté manifeste de contraindre les organisations syndicales à valider purement et simplement les projets retenus.

  • A Paris, la DRFIP ne pourra même pas se targuer de l’apparat et des artifices d’une démarche participative dans la mesure où seule une infime minorité d’agent.es a participé aux échanges via 4 ateliers composés de moins d’une vingtaine de « volontaires » parmi lesquels on relevait  une majorité de cadres A et A+.

  • Nous avons toujours dénoncé collectivement ce mode de fonctionnement qui a conduit la Direction à guider et à sélectionner, seule, les projets éligibles au regard notamment des contraintes dictées par la conduite prioritaire du NRP à Paris. Nous condamnons par ailleurs plus globalement ce « mensonge participatif » voulu par la DG pour contraindre à la fois au dépassement des OS tout en les incitant in fine à se compromettre dans un acte de cogestion ultime

  • Solidaires Finances Publiques Paris, la CGT Finances Publiques Paris et Fo DGFIP 75 ont également dénoncé collectivement le chantage dont nous avons été et sommes toujours l’objet et qui consistait à nous confronter à l’alternative et à l’ultimatum suivants : « Ou vous votez les projets que nous, Direction Parisienne, après un simulacre de consultation participative, avons jugé opportuns et surtout « réalisables » compte-tenu du déploiement de nos équipes techniques prioritairement sur la destruction de notre réseau (NRP) OU l’enveloppe Cadre de Vie de 485 000 € allouée à Paris sera perdue et reversée à d’autres Directions ! Soit vous nous suivez soit vous n’aurez rien ! »

  • Dans ces conditions, nous, (Solidaires Finances Publiques Paris, la CGT Finances Publiques Paris et FO DGFIP 75) nous sommes donc présentés devant vous au « CTL informel » ad hoc prévu le 15 avril dernier avec le souci de dépasser l’ensemble de ces contraintes et de faire profiter de façon la plus juste possible l’ensemble des agent.es de la DRFIP de cette enveloppe budgétaire. Plutôt que les projets que vous aviez sélectionnés  discrétionnairement et qui ne profitaient pas de la même manière à toutes et tous, nous avons demandé que ce budget de 485 000 € soit utilisé pour l’achat de chèques « ethi’kado » distribués à l’ensemble des agent.es parisien.nes de façon égalitaire. Nous avons ainsi exigé de pouvoir voter sur la base de cette proposition qui permettait d’éviter les pièges et difficultés précédemment évoqués tout en respectant l’essentiel du cahier des charges imposé dans le cadre du protocole (respect des normes sociales et environnementales…). Conformément aux consignes de la Direction Générale, vous vous êtes opposé à cette proposition que nous défendions unanimement, rappelant que la DG avait réaffirmé qu’elle ne souhaitait pas par cette enveloppe spécifique « donner à chaque agent.e un supplément de pouvoir d’achat individuel ». Nos trois organisations syndicales n’ont pu que déplorer ce décalage flagrant entre les attentes des collègues et les choix ministériels en cette période où la question du pouvoir d’achat est pourtant devenue la préoccupation première des Français.

Pour justifier ce refus, toute une série de contraintes juridiques a pu être invoquée nationalement comme localement. Cependant Solidaires Finances Publiques Paris, la CGT Finances Publiques Paris et FO DGFIP 75 constatent aujourd’hui que toutes les contraintes juridiques entourant ce protocole « cadre de vie » ne semblaient pas également indépassables.

En effet, pour être éligibles les projets retenus dans le cadre de ce protocole ne devaient théoriquement pas entrer en concurrence avec tout ce qui doit ou peut par ailleurs être financé via le budget de fonctionnement courant de la Direction ni via le budget propre du CHS-CT. Or il semble que vous ayez prévu - pour palier les conséquences d’un échec potentiel - de reproposer certains projets inscrits au protocole en CHS-CT prochainement.

D’autres aménagements posaient d’ailleurs originellement les mêmes questions : l’équipement en fontaines à eau doit-il procéder à vos yeux d’un protocole de reconnaissance de l’engagement professionnel des agent.es ? Ou ne devrait-il pas plus fondamentalement relever d’un aménagement « normal », courant et régulier de nos sites et nous garantir ainsi des conditions de travail décentes ?

Pour l’ensemble de ces raisons et face à l’obstination de votre refus de voter en faveur de notre proposition (l’allocation de chèques cadeaux à chacun.e des agent.es de la DRFIP), nos trois organisations syndicales ont donc localement pris les seules décisions cohérentes qui s’imposaient en refusant de cautionner ce déni de démocratie sociale.

Nous avons ainsi fait le seul choix que vous nous laissiez en décidant soit de ne pas prendre part à ce vote plébiscitaire soit en décidant de voter contre votre feuille de route déjà toute tracée, en parfait décalage avec les aspirations réelles de l’écrasante majorité de nos collègues.

 

Depuis ce 15 avril, un nouveau cap a même été franchi. La Direction Générale n’a manifestement pas apprécié que plusieurs Directions locales, à l’instar de la nôtre, ne lui aient pas offert pas le blanc-seing auquel elle aspirait (après avoir pourtant tenté de verrouiller autant que possible les conditions d’expression du « dialogue social »).

Sans même infléchir véritablement sa position initiale, la DG a donc incité les directions concernées à reconvoquer des CTL en espérant pousser leurs OS à revenir, en deuxième convocation, sur leurs positions initiales, le tout avant le début des congés estivaux.

Ainsi poussé par cette pression calendaire, vous avez, à Paris, tenté de fouler encore un peu plus au pied la démocratie sociale déjà passablement malmenée par l’organisation chaotique des « débats ». Vous avez en effet entrepris de contacter individuellement chacune de nos organisations syndicales pour tenter de conditionner la tenue de ce CTL à la susceptible évolution positive de nos votes respectifs. Unanimement nous avons refusé ces tractations officieuses et refusé de vous fournir une réponse qui vous aurez dispensé de réunir cette instance. C’est dans le cadre de cette instance que s’expriment ouvertement les débats et sont enregistrés nos décisions via un vote. La tenue d’une séance ne saurait par conséquent être soumise à la seule condition d’avoir acquis préalablement l’assurance d’un vote favorable à vos desseins.

Il en va du respect pour la représentation des personnels et c’est la raison pour laquelle nous avons tenu à ce que ce CTL soit officiellement reconvoqué aujourd’hui.

 

Pour en arriver au cœur de ce qui fonde notre présence ici aujourd’hui, la DG ne vous a manifestement laissé ni le temps ni la latitude pour faire évoluer votre position (mais le vouliez-vous seulement ?) puisque vous nous reconvoquez aujourd’hui, à marche forcée, sur strictement les mêmes bases que le 15 avril dernier. Nous n’imaginons pas que vous puissiez penser que sous le seul effet du temps écoulé depuis cette date, nous soyons désormais disposés à réviser notre jugement ou à dresser un constat moins déplorable que celui que nous établissions il y a moins de deux mois.

Les représentants de Solidaires Finances Publiques Paris, de la CGT Finances Publiques Paris et de FO DGFIP 75 sont donc aujourd’hui venus à nouveau, porter les mêmes exigences, renforcés par les consultations effectuées au cœur de nos sections respectives « sur un temps très court ». Nous sommes en effet venus aujourd’hui, renforcés également par les sentiments exprimés par des collègues rencontrés depuis le 15 avril dernier à l’occasion notamment des HMI que nous avons pu animer sur tous les sites parisiens.

 

Par conséquent, comme lors du dernier « CTL informel » d’avril, nous vous demanderons de bien vouloir vous prononcer en faveur de notre proposition d’allouer l’enveloppe budgétaire de 485 000€ à l’achat de chèques « ethi’Kdo » en faveur de chacun.e des agent.es de la DRFIP.

Faute de quoi, nous quitterons la séance immédiatement et déclinerons toute responsabilité quant aux conséquences d’un vote qui n’aura été que la sanction logique d’une vaste parodie de dialogue social et d’une instrumentalisation d’une démarche prétendument participative (dont nous craignons par ailleurs de voir les mêmes mécanismes à l’œuvre avec le cadre du « remue- méninges » lancé aujourd’hui par notre directeur général).