« La DGFIP 10 ans après la fusion : une transformation à accélérer » est la dernière production de la Cour des Comptes nous concernant, rendue publique le 20 juin 2018.

Alors que nous attendions les propositions de CAP 2022, c'est en fait la Cour des Comptes qui remet un brûlot sur notre administration : qui peut croire à une coïncidence ? Ce rapport est disponible sur le site internet de la Cour des Comptes et a déjà été largement repris par les médias.

Quelques unes des préconisations de la Cour des comptes

« Unifier les réseaux de recouvrement de la DGFiP et des douanes » :

ceci suppose une nouvelle réforme d’ampleur qui percutera la DGFiP et fragilisera également les douanes. Curieusement, nous apprenons au même moment, grâce à nos collègues Solidaires Finances Publiques siégeant au CHSCT de Haute-Garonne, qu'un projet de déménagement est prévu pour le service viticulture de la Douane à Gaillac : ces agents devraient en effet emménager dans le Centre des Finances Publiques, à la place occupée par le SIE (ce dernier étant transféré à Albi).

« Confier la mission topographique à l’IGN » :

ce qui revient à transférer cette mission historiquement assurée par notre administration et dont l’intérêt fiscal a purement été oublié de la Cour des comptes.

« Concentrer le conseil aux collectivités locales sur le conseil financier » et « abandonner les prestations ne répondant pas à un réel besoin » :

autrement dit organiser un repli dont seront victimes un grand nombre de petites et de moyennes communes. La Cour mentionne notamment les liens entre les élus et la Banque Postale, qui possède ses propres outils de conseil, dont certains sont « dits » plus performants que ceux de la DGFiP ; elle évoque également la Caisse des Dépôts et Consignations qui dispose d'un panel de services et qui entend en faire un axe de développement.

Mettre en place de « nouvelles modalités de tenus des comptes » et instaurer un « compte financier unique », qui remplacera les deux états financiers existants (le compte administratif établi par l’ordonnateur pour rendre compte de l’exécution budgétaire au cours de l’exercice et le compte de gestion du comptable public) :

il s’agit de généraliser le modèle d’agence comptable actuellement expérimenté dans certaines collectivités. Couplé aux évolutions actuelles (comme la certification des comptes), le compte financier unique annonce l’affaiblissement, voire la disparition, du rôle actuel du comptable public.

« Abandonner la stratégie multicanal dans la relation aux particuliers » en privilégiant le canal numérique et en améliorant l’accueil téléphonique que la Cour considère comme un « point faible » :

autrement dit, il s’agit d’organiser la disparition des services des finances publiques (donc leur maintien sur quelques résidences essentiellement urbaines). La préconisation est d’autant plus choquante que le rapport note par ailleurs que l’accueil physique est « globalement satisfaisant »… mais elle ne nous surprend pas puisqu'elle correspond pleinement à l'annonce faite par le ministre et son conseiller technique lors de leur déplacement à Gaillac (cf. le compte-rendu intersyndical).

Mettre « sans délai », à l’étude le « remplacement des 354 services de publicité foncière par un service à compétence nationale concentré sur un nombre limité d’implantations » :

ce qui revient à supprimer l’ensemble des SPF et à créer un nombre réduit d’antennes dont la pérennité n’est nullement garantie. Chacun appréciera l’impact d’une telle mesure sur le service public et les agents de SPF, alors que le Tarn procède à peine au regroupement de ses 2 services à Castres, répondant ainsi à l'injonction de la Direction Générale d'un seul SPFE par département…

« Resserrer les services des impôts » :

la Cour déplore le trop grand nombre de services des impôts des entreprises en mettant en avant les relations dématérialisées entre les entreprises et les SIE… Elle relaie un document prospectif interne de la DGFiP qui évoque un réseau resserré reposant sur des SIE de grande taille (50 agents et +). Il en va de même pour les Services Impôts des Particuliers : la Cour note que les flux d'accueil physique ont diminué de 20 % entre 2012 et 2016, alors que le nombre de SIP reste stable... Devons-nous nous attendre à ce qu'il n'y ait plus qu'un SIE dans le Tarn et seulement 2 SIP ?

« Resserrer le réseau comptable » :

1 600 trésoreries de moins de 10 agents (67 % des trésoreries), dont plus de 600 avec moins de 5 agents (26 %) ; la Cour estime que ces dernières, en particulier, ne sont plus aptes à rendre un service « suffisant ». Dans le Tarn, les trésoreries de Graulhet, Lavaur, et Mazamet comptent moins de 10 emplois implantés ; celles de Réalmont, Rabastens, St-Sulpice, Lacaune, Roquecourbe et St-Paul-Cap-de-Joux comptent 5 emplois implantés ou moins. La Trésorerie de Puylaurens va dépasser ce seuil critique « grâce » à la fusion avec la trésorerie de Dourgne. L'Adaptation des Structures et du Réseau n'allant pas assez loin, la Cour préconise une démarche « explicite et ambitieuse ».

« Renforcer l’échelon régional » :

en créant des directions régionales fortes : on devine ici que les Directions départementales des finances publiques seront affaiblies voire vidées de certaines de leurs missions.

Pas de préconisations pour le contrôle fiscal, mais...

En matière de contrôle fiscal, les auditeurs/trices de la Cour des Comptes constatent que le nombre de contrôles et les résultats sont en chute libre. Après la fusion, les effectifs du contrôle fiscal devaient être « sanctuarisés ». Or, entre 2012 et 2016, les effectifs du contrôle fiscal ont diminué de 12 %, soit une baisse plus que proportionnelle à la baisse globale des effectifs de la DGFiP (- 9 %).

La Cour ajoute : « En réalité, la sanctuarisation a été rapidement circonscrite aux emplois des brigades de contrôle et de vérification chargées du contrôle fiscal externe, avant que ces derniers ne se voient eux aussi touchés par les suppressions de poste. Elle n’a pas concerné les services en charge de la programmation du contrôle fiscal externe (PCE, BCR, DNEF, BEP), ce qui a entraîné une baisse du nombre de fiches de programmation ainsi que celle du nombre de contrôles ». Ce constat fait écho à nos propos, tenus lors du CTL du 14 juin, et auxquels notre directeur, M. Galvain, est resté sourd.

La solution ? « Des profils nouveaux seront donc nécessaires, notamment dans le contrôle fiscal pour mieux programmer les contrôles et les cibler sur les plus gros enjeux. Pour y pourvoir, la DGFiP se doit, outre la mobilisation des compétences internes via un effort de formation, d’utiliser beaucoup plus significativement les possibilités de recrutement de contractuels ». Et voilà ! Demain, la DGFiP embauchera des analystes/programmeurs formés par les banques pour « participer » au contrôle fiscal... en toute indépendance et dans le respect du secret professionnel, bien sûr... pour le temps qu'ils passeront dans notre administration et avant de retrouver leur précédent emploi, beaucoup plus lucratif !

La réponse du Ministre de l'Action et des Comptes Publics

« Ce rapport dresse un état des lieux de la situation de la DGFiP à la suite de la fusion et soulève des problématiques qui correspondent pour l’essentiel à des réflexions et des réformes auxquelles je souscris et que j'ai engagées ».

« Au-delà des efforts entrepris, la Cour considère que de nouvelles réformes ambitieuses doivent être engagées, en particulier en matière de transformation numérique, de réorganisation du réseau et de gestion des ressources humaines. Les recommandations de la Cour rejoignent très largement la démarche de changement voulue par le Gouvernement et organisée dans le chantier « Action publique 2022 ». Les préconisations du rapport viendront utilement nourrir les réflexions en cours et éclairer les travaux engagés ».

Si certains ont encore des doutes sur les attendus de CAP22 concernant notre administration, nous les invitons à lire ce rapport et à considérer les mots du ministre... Ça se passe de commentaires !

Ce rapport fait honteusement preuve d'une absence d'indépendance de la Cour et d'une mauvaise foi inquiétante pour notre démocratie et l'avenir du Pacte social !

Solidaires Finances Publiques tient à dire à la Cour des Comptes, comme au Ministre, que nous ne nous laisserons pas faire et nous le ferons savoir très rapidement !