Vous avez été certainement convié-es par votre chef de service  à faire part de votre réflexion sur les orientations stratégiques de la DGFIP qui ont été mises en ligne au mois d'octobre sur Ulysse.
En effet la Direction leur a demandé de réunir les "équipes" sur ce sujet et à l’issue de cette consultation, de  leur faire  remonter au plus tard le jeudi 21 novembre (délai de rigueur) une synthèse (2-3 pages) identifiant les compléments, les précisions, les amendements ainsi que des propositions concrètes de pistes de simplification, en  veillant à ce que leurs propres réflexions et propositions apparaissent clairement et distinctement . Comme évoqué en conférence téléphonique,  un groupe de travail animé par deux chefs de brigade assurera la synthèse de ces différentes contributions.

Dans ce cadre,  après avoir été interrogés par bon nombre de collègues sur la ligne à tenir et afin de ne pas se tirer une "balle dans le pied", à travers la participation à une pseudo-concertation visant à faire avaliser par tous les agents des reculs dans tous les domaines, en tant qu'agent-es des finances publiques et pour le service public, nous vous proposons le texte suivant (amendable évidemment) à transmettre individuellement ou collectivement à vos chefs de service :

«
Je souhaite réagir à la demande de consultation nationale "sur les orientations stratégiques et les pistes de simplification", relayée par notre Directeur.

En effet, je ne souhaite pas participer à cette consultation, ni par écrit, ni par oral.

Car voilà en effet une invitation qui ajoute un élément supplémentaire pour documenter la conception du dialogue que nourrit la Direction générale ces derniers temps.

Les mots ont-ils un sens ? L’emploi du terme « concertation » dans le contexte actuel est une manière bien particulière d’user du langage.

Depuis des mois, les personnels et leurs représentants expriment de manière récurrente leur malaise (cf. : les résultats de l’observatoire interne) face aux changements structurels incessants, à la destruction méthodique des règles de gestion (retenons l’exemple de de la mobilité choisie).

Depuis des mois, les personnels et leurs représentants réclament de la transparence, du dialogue, des marges de discussion, la sécurisation des missions, des avancées réelles.

A aucun moment depuis le lancement du projet de nouveau réseau de proximité, la possibilité n’a été offerte dans le cadre d’instances représentatives légitimes de débattre de la transformation profonde du réseau et des conditions d’exercice des missions. Lorsque des groupes de travail métiers sont proposés par l’administration centrale, ils se résument systématiquement à la présentation d’orientations sans possibilité d’évolution.

La question de la forme que doit prendre le dialogue social est central. Les mots concertation et négociation ont un sens qui ne peut être ignoré.
Comme il en a pris l’habitude, le Directeur général ne négocie pas et prétend maintenant se livrer au jeu de la discussion ouverte avec les agents, en contournant les instances représentatives légitimes.
La concertation est utile pour l’action publique mais son efficacité suppose un dialogue en amont du projet, suppose une démarche connue de tous. Son efficacité suppose une large information sur différentes options soumises au débat. La capacité qu’ont les participants à faire évoluer le projet est également une donnée essentielle du dispositif et doit être posée en toute transparence. A toutes fins utiles, la « concertation » requiert la présence d’un garant pour assurer la qualité de l’information. Enfin la concertation suppose un calendrier qui doit intégrer aussi bien une phase d’information, de rencontres et d’échanges. Un tel « process » demande tout à la fois du temps et des moyens pour aboutir à une décision motivée tenant réellement compte des échanges.

Face aux enjeux actuels et au malaise exprimé, il ne suffit pas de convier dans l'urgence les uns et les autres à des réunions vides de sens, à engager une démarche purement formelle pour satisfaire au devoir de dialogue social,  réduit à un simple exercice de communication descendant.

Car, sur le fond, de quoi pourrions nous discuter ?

Comment prendre part en toute quiétude à cette "concertation" alors même que se déploie des  réformes structurelles et organisationnelles sans précédent (nouveau réseau de proximité , rupture conventionnelle pour les fonctionnaires, remise en cause de toutes les garanties en terme de règles de gestion,  embauche de cadres contractuels, etc ... ) qui va bouleverser nos environnements de travail et nos repères professionnels ?

Alors qu’il y a quelques années, au moment de la fusion, on nous promettait des missions et des perspectives de carrières valorisantes, on assiste aujourd’hui dans nombre de services à une segmentation des chaînes de travail, à une augmentation des travaux de masse sans intérêt pour la majorité, ou de travaux assortis de toujours plus de sujétions sans aucune reconnaissance.
A l’heure où nombre de structures vont être rayées de la carte, nombre de missions déplacées ou supprimées, nous n’avons aucune visibilité sur les nouvelles modalités de gestion, sur l’avenir de nos métiers, le sens de notre travail,  les formations, et les évolutions de carrière. Pour reprendre l’exemple du nouveau réseau de proximité, d’un côté, on affirme qu’il n’y aura pas de mobilité forcée alors que de l’autre on prévoit des mesures pour accompagner les mobilités subies. Orientations « stratégiques » ?

S’agissant plus particulièrement du contrôle fiscal, entre un discours du ministre qui se dit offensif tout en cherchant à minimiser le chiffre de la fraude, une note du DG invitant les vérificateurs à ne pas « taper trop fort », à « transformer la relation au contribuable » et des propos du Président de la République qui parle du  faire"douiller" les entreprises et jettent le discrédit sur le agents chargés du contrôle, comment pouvons-nous envisager une discussion sérieuse et sereine sur notre avenir professionnel?

A titre personnel, je refuse de servir d’alibi à ce simulacre de concertation. Je ne souhaite pas qu’en mon nom soient légitimées ces orientations qui sont, de toutes façons,  déjà arrêtées. J’en laisse la responsabilité aux "experts" et aux stratèges.»