Successions : se donner les moyens de réaliser nos missions de service public

Taxe très symbolique, l’impôt sur les successions est pourtant mal connu en France. Alors que près de la moitié des ménages français ne touche aucun héritage1, il reste très impopulaire, certains
n’hésitant pas à le taxer « d’impôt sur la mort ». Selon la Cour des Comptes
2, les droits de succession ont une fonction redistributrice, cependant modérée par des dispositifs fiscaux dérogatoires qui favorisent les ménages aux patrimoines les plus importants. Ce constat est confirmé par l’Observatoire des inégalités3 pour qui « les droits de succession ne jouent pas leur rôle de réduction des inégalités ».

Au-delà de cette question légitime d’une fiscalité successorale plus juste sur laquelle notre organisation syndicale reviendra dans les prochains mois, pour Solidaires Finances Publiques, il est nécessaire de mettre en lumière les difficultés rencontrées actuellement dans les services de la DGFiP pour taxer les successions.

Derrière les déclarations, la dégradation des conditions d’exercice des agents et des agentes
Dernier impôt dont la déclaration s’est faite sous format papier, l’enregistrement des déclarations de successions a lieu en services de gestion : dans les Services Départementaux de l’Enregistrement (SDE) ou les Services de Publicité Foncière et de l’Enregistrement (SPFE). Ce sont ensuite les Pôles de Contrôle Revenus/Patrimoine (PCRP) qui en assurent le contrôle.

Ici comme ailleurs, le manque de moyens humains a considérablement altéré les liens entre les services de gestion et de contrôle. Or, il n’y a pas de contrôle efficace sans des services de
gestion renforcés, car c’est bien là où les premiers signes de fraude sont souvent observés. Alors que de nombreuses informations se transmettaient entre agents et agentes de bureaux différents,
l’éclatement des services sur plusieurs lieux a mis un terme à ces
échanges informels et pourtant essentiels pour la bonne gestion de nos missions.
Adapter notre mission de service public à la pénurie d’effectifs dans les services
Faute d’effectifs suffisants, et après les nombreuses suppressions de postes qui ont frappé tous les
services de la DGFiP ces dernières années, les agents et agentes déplorent le manque de temps pour réaliser certaines de leur missions. C’est le cas, par exemple, des relances de successions. Le manque de personnel ne permet plus de faire les enquêtes nécessaires pour connaître les héritiers et les héritières et déterminer les enjeux fiscaux. Dès lors, certaines relances ne sont plus réalisées. La Cour des Comptes relève à juste titre que « les statistiques relatives aux relances amiables par département révèlent de grandes disparités ». De la même façon, alors qu’il serait nécessaire de saisir les déclarations de succession « néant » car, même en l’absence de taxation, les données peuvent redescendre et alimenter certaines applications comme BNDP, les directives sont plutôt à l’allègement des tâches côté gestion pour pallier, entre autres, le manque de personnel.


Contrôle fiscal : « c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes »

Pendant de nombreuses années, le contrôle fiscal des successions a reposé sur un mix de contrôle de dossiers à forts enjeux et de contrôles issus de la programmation d’initiative locale. Mais, comme pour le contrôle fiscal
des professionnels, le développement de l’intelligence artificielle, avec les listes data-mining envoyées par la Centrale, prend de plus en plus de place dans la programmation, avec là aussi des résultats bien en deçà des enjeux et un taux d’échec important. Pour Solidaires Finances Publiques, rien ne saurait remplacer la technicité et le savoir-faire des agents et des agentes en matière de contrôle fiscal. Cette chaîne du contrôle démarre avec la veille des personnels des services de gestion qui, grâce à leur connaissance du tissu fiscal, décèlent des omissions, des incohérences ou des anomalies lors de l’enregistrement des déclarations de succession et les signalent aux services de contrôle compétents.
Solidaires Finances Publiques, aux côtés des agents et des agentes, déplore la sape de ces missions
de service public. Comme dans d’autres secteurs de notre administration, la diminution des
effectifs et les réorganisations ont eu pour conséquences de casser les chaînes de travail, et de
dégrader les conditions de travail.

 

1) Oxfam France : 4 idées reçues sur l’héritage et les successions https://www.oxfamfrance.org/inegalites-et-justice-fiscale/4-idees-recues-sur-lheritage-et-les-droits-de-succession/
2) La Cour des Comptes : « Les droits de succession, communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale », Juin 2024

3) Observatoire des inégalités : https://inegalites.fr/L-heritage-profite-aux-riches-1760 / https://inegalites.fr/L-impot-sur-l-heritage-est-il-vraiment-aussi-impopulaire-qu-on-le-dit

 

 

En 2025, nous continuerons ensemble à aller plus loin que l'impossible, pour une société plus juste et solidaire.

Dans ce monde si tourmenté, les militantes et militants
de Solidaires Finances Publiques
54 vous souhaitent une belle et heureuse année 2025.

 

PS : Nous remercions nos camarades d’Occitanie pour leur travail d'écriture.

pdfTract_Successions.pdf