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Tribune parue dans Libération le 3 mai 2019 :

Le gouvernement minimise-t-il la fraude fiscale ?

Par Vincent Drezet ancien secrétaire général de Solidaires Finances Publiques, Eva Joly magistrate, députée européenne, Gabriel Zucman économiste, professeur à l’université de Berkeley Lison Rehbinder coordinatrice de la Plate-forme «paradis fiscaux et judiciaires»

Le chef de l'Etat souhaite réduire la présence de l’administration fiscale et privilégier un accompagnement des entreprises dans leur déclaration. Une réorientation de sa politique qui interroge, d'autant qu'elle nécessite de revoir à la baisse l’ampleur de l’évasion et de la fraude fiscales.

Tribune : Choquée par la succession d’affaires révélant l’ampleur et la complexité de l’évasion et de la fraude fiscales, l’opinion attend plus que jamais que l’on combatte mieux ce que l’on peut qualifier de fléau. Depuis quelques mois toutefois, des voix s’élèvent insidieusement pour contester les estimations de l’évasion et de la fraude fiscales. Exprimant lui-même ses doutes, le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, avait proposé la création d‘un «observatoire de la fraude fiscale» censé produire une estimation impartiale de la fraude fiscale. Mais Emmanuel Macron a annoncé que ce travail serait finalement dévolu à la Cour des comptes. Une affaire à suivre de près.

Curieusement, les rares expressions qui minimisent l’ampleur de l’évasion et de la fraude fiscales ne sont jamais étayées, elles ne proposent aucun contre-argumentaire ni aucune autre évaluation. Ce travail de sape ne doit en effet rien au hasard, son objectif est de décrédibiliser les estimations existantes pour faire le lit d’une nouvelle approche de la lutte contre la fraude fiscale. Il est le fait de personnalités et d’entités acquises à la thèse selon laquelle l’évitement de l’impôt est un délit mineur, voire justifiable. Pour elles, le contrôle fiscal est une intrusion préjudiciable à l’activité économique (un argument employé au début du XXe siècle par le mouvement conservateur), il doit privilégier l’accompagnement personnalisé. Et ce, au risque d’abandonner sa raison d’être : servir l’intérêt général en étant la contrepartie du système déclaratif.

Minimisation de la fraude fiscale

Etrange coïncidence, cette polémique naît au moment où le gouvernement engage une réorientation du contrôle fiscal. Avec sa loi essoc («loi pour un Etat au service d’une société de confiance»), il souhaite réduire la présence de l’administration fiscale, privilégier un accompagnement des entreprises et accroître le rôle des commissaires aux comptes qui délivreront à leurs clients un certificat de conformité à la loi fiscale, un dangereux mélange des genres «client-contrôlé» qui n’est pas sans rappeler l’affaire Enron. Seulement voilà, pour justifier publiquement cette réorientation, il lui faut préalablement minimiser l’ampleur de l’évasion et de la fraude fiscales. Ce que s’emploient à faire les personnalités favorables à cette stratégie.

Estimer précisément les pertes liées à l’évitement illégal de l’impôt n’est certes pas chose aisée. Il est cependant utile et possible d’en cerner l’ordre de grandeur sur la base d’une définition claire : le non-respect de la loi et de l’esprit de la loi. Utile, car le mesurer et en connaître les rouages permettent de mieux le combattre. Possible, car les données et les méthodes d’évaluation ont connu de réels progrès en matière d’extrapolation des résultats du contrôle fiscal (pour ce faire, des contrôles aléatoires seraient intéressants à mener) et d’utilisation de données macro-économiques, ce que les pourfendeurs zélés des estimations existantes ignorent ou feignent d’ignorer. Quelle que soit la méthode employée, les évaluations convergent et montrent que le coût de l’évasion et de la fraude fiscales est très élevé. Cela n’a rien d’étonnant : si ses formes traditionnelles demeurent, l’évitement de l’impôt s’est diversifié et complexifié sur fond de concurrence fiscale, de déréglementation ou encore d’ingénierie juridique, financière, comptable et fiscale.

Cessons de nier la réalité : qu’elle se situe à 60 ou à 100 milliards d’euros, la fraude fiscale est bel et bien un phénomène d’ampleur qui dégrade le consentement à l’impôt, plombe les finances publiques et fausse l’activité économique. Cette situation n’est pas propre à la France : au sein de l’Union européenne, près de 1 000 milliards d’euros échappent aux caisses des Etats, des collectivités locales et aux systèmes collectifs de protection sociale.

Pour intéressantes qu’elles puissent paraître, les mesures de ces dernières années prises en France et dans d’autres pays sous la pression des opinions ne suffisent pas à endiguer le phénomène. Il faut donc prendre le problème à bras-le-corps. De ce point de vue, le renforcement des moyens juridiques, humains et organisationnels des administrations fiscales, douanières et judiciaires est une priorité. Et il faut aussi s’engager sur la voie d’une vraie transparence fiscale pour les multinationales, d’une réforme en profondeur de l’impôt sur les sociétés, d’une harmonisation fiscale européenne de l’impôt sur les sociétés et de la TVA, de la création d‘un cadastre financier mondial, d’un impôt supranational sur le patrimoine et les sociétés et de procédures de contrôle adaptées. Techniquement, rien ne s’oppose à ces mesures. Et politiquement ? C’est toute la question.


Casser le thermomètre au lieu de soigner le malade !

La dernière trouvaille du gouvernement: contester l'évaluation de la fraude fiscale établié par notre syndicat ET reconnue depuis par tous ( INSEE, ONG, gouvernements ...). C'est logique : s'il reconnait l'ampleur du problème, il va être difficle d ejustifier d ene pas avoir mis en  place ce qu'il faut pour le combattre !

Des voix s'élevent ( pas encore assez nombresues à notre goût) pour demander des effectifs pour la DGFIP pour lutter contre la fraude.

Nous avions rencontré Eric Bocquet lors de notre action du 19 mars. Il devait prendre la tête de  de l'obsrevatoire de la fraude avant d'apprendre par conférence de presse que cette mission serait menée par la cour des comptes.

Notre syndicat a donc écrit à la cour des comptes ce jour.

extrait :

Notre organisation ne se contente pas de déplorer cette situation préoccupante. Elle livre également un certain nombre de préconisations qui portent sur la conception, la stratégie et les moyens (juridiques, humains et organisationnels) du contrôle fiscal. Nous joignons au présent courrier la contribution envoyée aux députés membres de la Mission d'information sur l'optimisation et l'évasion fiscales. Elle reprend en effet de nombreux points susceptibles d’entrer dans le périmètre de la mission qui vous a été confiée.

Le projet de loi fonction publique va détruire la fonction publique et plus généralement les services publics. On assiste ainsi à une vaste opération de restructurations, destructurations, externalisations, privatisations et abandons de missions enclenchées avec Action Publique 2022. Le tout bien sûr avec toujours moins d'emplois (120 000 suppressions sur le quinquennat) et toujours plus de coupes budgétaires (60 Mds €).

Lire les tracts

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CTL BILAN ACTIVITE DE LA DNEF- BUDGET

FORMATION PROFESSIONNELLE

17 avril 2019

Le compte rendu de ce CTL sera très bientôt mis en ligne 

Depuis un siècle, le contrôle fiscal est la contre partie du système déclaratif. Il sert l'intérêt général en combattant la fraude fiscale. Celle-ci, par son ampleur et ses conséquences, est jugée de plus en plus insupportable par la plupart de nos concitoyens.

Tout plaide pour le renforcement du contrôle fiscal et de la Recherche mais la boussole du gouvernement indique le sud. Comment retrouver le nord de toutes façons quand le seul objectif de toutes les réformes est de supprimer des fonctionnaires, faire des économies et donc affaiblir le contrôle ??

Tout cela au nom du dogme de la réduction impérative de la dette que l'on sert invariablement au citoyen pour le faire trembler et justifier de lui retirer son service public. C'est tellement plus facile de lui faire peur avec cette dette que de vraiment avoir le bon débat sur celle-ci : d'où vient-elle ? à quoi sert-elle ? qui la détient, à quel taux ? ...

Ce n'est pas l'objet de ce CTL….quoi que : c'est quand même la déclinaison de cette politique qui fait que vous nous avez déjà dit que la DNEF devait prendre sa part dans l'effort de réduction d'emplois.

Si pour la Commission européenne, la fraude fiscale est « un problème énorme », les choix budgétaires et, osons-le dire, idéologiques, du gouvernement en matière de contrôle fiscal vont à contre-sens des besoins en matière de lutte contre la délinquance fiscale. Il poursuit en effet sa route vers la casse, car il faut bien nommer les choses, du contrôle fiscal et de la Recherche. Ceci s’illustre par :

  • la volonté du gouvernement de réorienter le contrôle fiscal : pour le dire simplement, beaucoup de « loi Essoc » et un peu de « police fiscale » ne fait pas une bonne recette et ce d’autant plus que l’on affaiblit le contrôle fiscal administratif…

  • un contrôle de plus en plus affaibli et « lointain » (contrôle du bureau…): la chute du taux de couverture du tissu fiscal est déjà visible

  • le pari des algorithmes qui oublie : 1/ que ceux-ci ne peuvent être utiles que si les données sont biens servies en amont et bien exploitées en aval et 2/ que la recherche ne peut et ne doit se faire que sur la base d’exploitation de listes.

Ajoutons à cela des règles de gestion de plus en plus arbitraires, le tout sans reconnaissance des agent.es en termes de rémunération et de plan de qualification !

Récemment, le rapport du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de la lutte contre la délinquance financière (pour partie consacré à la fraude à la TVA) l’a pourtant démontré une fois de plus : pour combattre une délinquance financière qui n’aura jamais été aussi diverse, complexe et sophistiquée, il faut des services spécialisés et techniciens dotés de moyens suffisants.

La DNEF a donc un rôle stratégique central à jouer : il doit être consolidé et renforcé

A l’évidence, la recherche et l'exploitation fiscale des renseignements permettant de lutter contre les fraudes les plus graves, la détection des procédés de fraude et la conduite des opérations de recherche et d'enquête en vue notamment de proposer des contrôles fiscaux aux autres services de la DGFiP est une mission centrale. C’est donc peu de dire que le rôle de la DNEF est stratégique. Malheureusement, nous avons tout de même eu à déplorer des suppressions d’emplois et la suppression de la BII Paris sud… Un signal inquiétant pour l’avenir.

Sans dresser un bilan exhaustif de son activité, nous souhaitons revenir sur plusieurs points qui démontrent l’importance de la DNEF et plaide pour sa consolidation et son renforcement. Où que l’on porte le regard sur la fraude fiscale, l’évolution de la place et du rôle de la DNEF, et par conséquent de la charge de travail de nos collègues, ne sont plus à démontrer.

A titre d’exemples :

  • Le contrôle fiscal des schémas de fraudes carrousels TVA : vu l’ampleur de ce type de fraude, c’est un secteur à renforcer. Rappelons également pour mémoire que les suspensions de numéros de TVA ont fortement augmenté ces dernières années

  • La mise en oeuvre du droit de visite et de saisie (article L. 16 B du livre des procédures fiscales) : cet outil très utile à l’administration pour caractériser les délocalisations abusives de matière imposable doit être maintenu et ne doit pas être la victime collatérale de la mise en place de la police fiscale ni de l’austérité budgétaire que subit la DGFiP.

  • La détection et la surveillance des secteurs fraudogènes et des opérateurs fraudeurs

  • Le rôle d’interlocutrice important, au plan national et européen, d’acteurs majeurs de la lutte contre la fraude (échanges avec les autorités fiscales européennes dans le cadre d’EUROFISC, partenariat avec la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, exploitation des informations émanant de TRACFIN, alimentation en dossiers de poursuites correctionnelles de la « police fiscale » …).

  • La mise en en œuvre du droit communication non nominatif (DCNN) avec compétence exclusive de mise en oeuvre du DCNN auprès de certains opérateurs : vu le développement des diverses formes de délinquance financière, cette disposition récente jouera certainement un rôle de plus en plus important à l’avenir.

Si l’activité de la DNEF est déjà soutenue, alors que ses moyens humains ne suivent pas, les défis ne manquent pas :

- Evolution de la BNEE

- Procédures administratives (L16B) à l’heure du développement des OFJ

- Logiciels frauduleux

- Contrôle de la facturation électronique

- Hausse probable du DCNN (notamment dans le cas des fraudes sur internet : globalement, celles-ci sont à la hausse, cf le rapport de l’An sur la délinquance financière)

- Collaboration avec les douanes

- Lien avec police fiscale

- Vers plus d’informations à traiter (coopération internationale par ex)

- Impact des dispositions du plan Beps sur la Dnef

Le niveau de participation des agents de la DNEF aux journées de mobilisation du mois de mars doit vous interroger. Non seulement le taux de la DNEF est plus élevé que le taux national mais si on enlève dans le calcul les agents, notamment de BII, qui ont été dans la quasi-impossibilité de faire grève, nous atteignons un taux de mobilisation très élevé, reflétant un vrai ras le bol et/ou des inquiétudes des agents de la DNEF, que ce soit dans l'exercice et l'avenir de leur métier de leur missions ou dans leurs possibilités de perspectives de carrière mais aussi une vive inquiétude sur l'avenir de la fonction publique.

Sans compter qu'ils en ont assez d'être stigmatisés comme des fainéants voire incompétents privilégiés, par certains médias mais aussi maintenant par leur employeur.

Nous ne pouvons terminer cette déclaration liminaire sans évoquer la cas de Toulouse : Honte à ce ministère et nous pesons nos mots.

La DGFiP a sombré dans l'ignominie il y a quelques jours, en réclamant devant le Tribunal Administratif de Toulouse la condamnation de 40 de ses agents à verser 1000 € par personne assignée et par jour de blocage. Ainsi, les masques tombent et l'on voit bien que la répression de tous ceux qui contestent est devenue la seule et unique réponse managériale.

Solidaires Finances Publiques considère que cette procédure est une véritable déclaration de guerre de la DGFiP contre ses propres agents, leurs représentants syndicaux et que par cet acte odieux, l'administration porte encore un coup au dialogue social déjà bien dégradé !

Vous allez nous répondre que la DGFiP se place dans le cadre strict de la loi et que nous nous devons d’être exemplaires en tant qu’agent d’État. Mais la loi ne doit pas être un outil pour faire taire dans l’oeuf toute contestation naissante.

Mais bon, adoptons cette logique et parlons de l’exemplarité des comportements.

Vraiment exemplaires, tous ces très hauts fonctionnaires qui se sont plus servis de l’État, que de servir l’État ces dernières années ?

Combien de nos anciens Directeurs Généraux des Impôts et du Trésor se sont retrouvés dans les conseils d’administration des Banques avec une explosion de leurs salaires sans que jamais la commission de la déontologie ne trouve rien à y redire.

On peut citer MM LEMIERRE, BEAUFFRET, VILLEROY DE GALHAU, BEZARD et bien d'autres encore la liste est longue ... tous partis pantoufler dans une banque privée ou un « think thank » bancaire, juste après avoir présidé aux destinées d'une administration publique.

Exemplaires nos hauts fonctionnaires quand on apprend dans cet article d'un grand quotidien national du 28/06/2017 que plus de 55 % des agents de l'Inspection Générale des Finances finissent dans le système bancaire Français ?...donc dans ces banques Françaises de renom qui pratiquent allègrement, et avec la complicité de l’État, l’optimisation fiscale ?

Et quand elles se font prendre dans les différents scandales comme les "Panama papers" ou autres (avec la création de plusieurs centaines de filiales dans les paradis fiscaux), aucune poursuite réelle n’est engagée par le gouvernement.

Exemplaire cette justice quand on observe que depuis quelques années, plusieurs conseillers d’État sont recrutés par les cabinets d’affaires qui utilisent leurs formations payées par les contribuables et leurs savoirs pour contourner la législation qu’ils ont contribué à mettre en place ?

Exemplaire ce gouvernement quand le ministre des Transports fait désormais un appel d’offres public à des cabinets d’avocats privés spécialisés dans le transport pour sous traiter la rédaction des textes législatifs au nom de l’État ?

Au-delà de ces injustices, mesurez bien Mesdames et Messieurs les «managers» les effets dévastateurs qu’auront ces procédures répressives sur l’état d’esprit des agents dans tous les services et le signal qui est donné de façon plus générale sur la société qui nous est promise par le «nouveau monde». Un nouveau monde qui, de plus en plus, ressemble à une oligarchie au service des intérêts financiers.

Le gouvernement a décidé d'examiner le projet de réforme « fonction publique » qui a été rédigé en plein grand débat et en procédure accélérée. L’Assemblée nationale et le Sénat ne se prononceront donc qu’une fois sur ce projet majeur. La loi serait applicable dès le 1er janvier 2020.

La brutalité du gouvernement, sur le fond comme sur la méthode, est insupportable. Peut-on parler encore de démocratie sociale quand aucune, nous disons bien aucune, proposition des organisations syndicales n’a été retenue pendant la phase de «pseudo-concertation » sur ce projet de loi qui modifie notre statut et déréglemente nos règles de gestion.

Plus que jamais, nous alertons les agent-es des Finances publiques sur les conséquences d’une telle "réforme", qui représente en fait une contre-réforme !