En réponse à sa troisième version de son projet de déclinaison locale du « Nouveau Réseau de Proximité », Solidaires FInances Publiques 13 a écrit le courrier ci-dessous au Directeur Régional de la DRFiP PACA 13. Pour nous, le N.R.P., c'est toujours non, et notre analyse et nos contre-propositions le justifient. Ensemble, par la force du nous, imposons un autre avenir.
Monsieur le Directeur Régional des Finances Publiques,
Le 17 juillet 2020, vous avez transmis aux organisations syndicales la nouvelle version (la troisième après juin et novembre 2019) de votre projet de déclinaison locale du « Nouveau Réseau de Proximité » à la DRFiP PACA 13.
Ce projet, baptisé d’abord « Géographie revisitée », vise à « mieux répondre aux besoins de proximité des usagers », « répondre de façon plus satisfaisante aux besoins de conseil des élus locaux » et « rééquilibrer la localisation des services de la DGFiP » (fiche 1 du Groupe de Travail national dédié du 21 février 2020). Pour Solidaires Finances Publiques 13, ce projet n’est en réalité qu’une adaptation de notre outil de travail collectif (missions, emplois, réseau) à la volonté politique de dépecer pour mieux détruire notre Administration régalienne.
En effet, cette attaque inédite et brutale a été fomentée de longue date mais s’est faite jour à un moment où les pouvoirs politiques imposent à marche forcée aussi bien la réforme du statut de la Fonction Publique qu’un abandon progressif mais déterminé de ses missions. De la même manière, la déréglementation de nos droits et garanties, notamment en matière de mobilité choisie, est concomitante de votre projet. La mise en place des Lignes Directrices de Gestion n’a en effet qu’un but ; pouvoir déplacer les agents comme des pions et préparer le passage d’une Fonction Publique de carrière à une Fonction Publique d’emplois, et particulièrement à la DGFiP. La DGFiP déstructure ses réseaux et ne veut plus être entravée par des garanties offertes aux agents, pourtant gages de leur sérénité et de leur neutralité. Si elle n’est finalement peut-être pas géographique pour tous, cette mobilité forcée sera fonctionnelle. Sans un effort très conséquent en matière de formation professionnelle (qui, ne nous leurrons pas, ne sera pas entrepris en raison des habituelles raisons budgétaires), cette mobilité fonctionnelle va entraîner automatiquement une perte de technicité, de connaissances, de savoir-faire, particulièrement préjudiciable à la qualité de service rendu à l’usager. Mais la parade est toute trouvée puisque la technicité exigée pour l’exercice de nos missions est ramenée à sa portion congrue. En continuant de créer des unités gigantesques par fusion de services de même nature (S.I.E., S.I.P., S.P.F., C.D.I.F.), en poursuivant votre entreprise de casse de la chaîne de travail (back office / front office ou polarisation notamment), vous persévérez à affaiblir l’approche globale de nos métiers. Aux risques psycho-sociaux générés par ces conflits de valeurs et à la qualité empêchée s’ajoute l’insécurité de la situation au travail dans le contexte de suppressions d’emplois et de restructurations permanentes. La perte de sens des missions via l’industrialisation des tâches fragilise nos conditions de travail. Ce service public dégradé est donc particulièrement préjudiciable aussi bien aux agents qu’aux usagers.
Car ce plan de démantèlement a été promu largement auprès des usagers (particuliers, professionnels et élus) comme un accroissement de notre présence au cœur des territoires. Las, votre opération de publicité n’a pas résisté à la démonstration technique des agents et de leurs représentants. Partout où nous avons rencontré les usagers, ils ont tous reconnu aisément que les « points de contact » ne remplaceront jamais un accueil de pleine compétence (agents formés, sous statut, disponibles et gestionnaires du dossier) pas plus que les Conseillers aux Décideurs Locaux (C.D.L.) ne remplaceront efficacement les équipes des Trésoreries. La circulaire du Premier Ministre sur la mise en place des Maisons France Services détaille clairement le rôle de ces nouveaux espaces : tout d’abord « délivrance d’une information de premier niveau en matière de fiscalité des particuliers ou de paiement des recettes recouvrées par la DGFiP », puis « orientation vers l’interlocuteur compétent » et enfin « aide à la prise de rendez-vous auprès d’un expert de la DGFiP ».
Cette vision d’un service public low-cost bien loin des attentes de nos concitoyens en la matière s’illustre également à travers la mise en œuvre des Conseillers aux Décideurs Locaux (C.D.L.). Elle a pour but, selon l'Administration, de combler des insuffisances. Si le constat de la difficulté pour les Comptables d’exercer l’ensemble des missions qui leur incombent peut être partagé, cette situation résulte des choix passés de la DGFiP que nous n’avons eu de cesse de dénoncer. La concentration de nombreux budgets au sein de Trésoreries, beaucoup moins nombreuses, a conduit à la dégradation du conseil apporté aux collectivités. Le manque de moyens a relégué au second plan l’expertise et l’accompagnement. Mais la réforme proposée va reproduire les mêmes travers. Ainsi les missions dévolues aux C.D.L. (optimisation des bases fiscales, marchés publics, analyse financière...) nécessitent des compétences de comptable avec une technicité aiguisée ainsi qu’une grande expertise. Le lien gestion / conseil est indispensable pour fluidifier la relation entre les collectivités et les responsables de l’Administration. Ce choix organisationnel conduira à des antagonismes croissants et à une défiance des collectivités à l’égard des responsables de S.G.C. (Services de Gestion Comptable, services de back-office), fragilisant ainsi la mission de tenue de la comptabilité et de contrôle de la dépense des collectivités locales par la DGFiP. Cette réforme risque ainsi d’alimenter les arguments de celles et ceux qui, d’ores et déjà, souhaitent que la DGFiP soit dépossédée de la mission de gestion comptable des collectivités locales.
Depuis plus de dix ans, les nombreuses concentrations de service permettent d’avoir aujourd’hui une analyse objective de leurs effets. Ni les conditions de travail des agents ni la qualité de service rendu à l’usager ne sont aucunement améliorées. La situation de nos accueils en témoigne. La fermeture des Trésoreries mixtes, avant-postes du réseau au sein des territoires, va en outre surcharger les accueils des S.I.P.. Massifier, standardiser, découper et automatiser le travail que l’on ne peut plus réaliser aujourd’hui (sous l’effet de vos décisions) va incontestablement nuire à sa qualité et à son intérêt. Et comme regrouper les services ne suffit plus, vous proposez désormais d’accélérer la polarisation des tâches, en premier lieu en matière de fiscalité des professionnels. Votre premier projet de juin 2019 évoquait deux pôles à compétence départementale (un pour les AviSiR et un autre pour les remboursements de crédit). Puis votre deuxième projet de novembre 2019 n’en parlait plus. Et voilà que votre troisième version reprend cette idée de pôles avec non plus deux mais trois unités à compétence départementale (Marignane, Salon, Tarascon), sans en préciser les contours de compétence technique. En vidant les services « de base » de leurs missions, vous participez à leur affaiblissement, sans même parler des conséquences en matière d’emplois.
Votre projet de « Nouveau Réseau de Proximité » repose également sur votre volonté d’étoffer les services. Si cette volonté est louable, rappelons toutefois que cet étoffement est rendu nécessaire par vos décisions en matière de suppressions d’emplois. Et on en arrive là au nœud gordien de votre problématique. Les sujets de l’emploi, des missions et des structures sont consubstantiels. En effet, il ne peut être question de restructuration sans évoquer la politique d’emploi de la DGFiP. Vous n’avez comme solution à la détresse des agents, usés de voir, années après années, les postes autour d’eux être supprimés, et donc leur charge de travail augmenter, que d’additionner les services exsangues, de regrouper les peaux de chagrin en espérant ainsi faire la maille. Alors plutôt que d’inverser le paradigme, et de traiter les causes, vous conservez votre postulat de destruction des emplois, et cherchez à répartir la pénurie, à densifier artificiellement les services et à abandonner certaines missions. La proposition de Solidaires Finances Publiques 13 est toute simple : comblez a minima l’ensemble des vacances de postes de la DRFiP PACA 13. Fournissez ainsi aux collègues les conditions de travail dignes (effectif, immobilier) et indispensables à l’exécution de l’intégralité de leurs missions. Notre réseau et nos structures sont viables à condition de leur donner les moyens de fonctionner. Reconnaissez nos qualifications, notre technicité et tous nos efforts d’adaptation.
Vos trois versions successives ont, in fine, peu évolué. Un S.I.P. ici, un S.I.E. là qui restent, quelques délais accordés ou raccourcis ici ou là, aucune inclinaison réelle malgré les objections de l’intégralité des acteurs concernés (agents quel que soit le grade, usagers, élus…). Votre troisième mouture ne fait d’ailleurs pas mention des conséquences de la « démétropolisation » décidée par le Ministère (100 emplois à délocaliser de Marseille). Aucun de nos arguments techniques ou de géographie humaine n’a été retenu. Aucune concertation et donc aucun dialogue dans la mesure où aucune interpénétration des points de vue ne s’est opérée. Après plus d’un an, nous n’avons toujours pas entendu d’argument d’une autre nature que l’application de la doxa ultra-libérale. Solidaires Finances Publiques 13 n’est donc toujours pas convaincu par la viabilité de votre projet. Pour nous, il ne demeure qu’un simulacre de modernisation d’une DRFiP PACA 13 qui doit juste supporter les saignées successives d’emplois et sa disparition progressive programmée.
Vos décisions cherchent à placer notre Administration dans un rôle de conseiller, de guichet de renseignement, d’audit, abandonnant des pans entiers de nos missions régaliennes, et réduisant ainsi notre efficacité, notre qualité et tout ce qui fait corps aujourd’hui (statut, rémunération, formation, déroulé de carrière…). Notre conception du service public et de la DGFiP est toute autre ; les attentes des usagers en matière proximité ou de justice fiscale aussi. Investir dans la DGFiP de demain, c’est au contraire recréer des emplois statutaires. Investir dans la DGFiP de demain, c’est réhabiliter l’enjeu des conditions de travail et offrir, par la rémunération, une véritable reconnaissance aux agents. Investir dans la DGFiP de demain, c’est avoir une véritable ambition territoriale pour maintenir, consolider et renforcer nos implantations pérennes et de pleine compétence. Investir dans la DGFiP de demain, c’est considérer le développement du numérique comme un atout pour se développer plutôt qu’une occasion de nous détruire.
Afin de mettre l’ensemble de votre projet de réformes structurelles sur la table, Solidaires Finances Publiques 13 vous demande à nouveau officiellement de mettre en œuvre les accords de Bercy (prévus par la circulaire relative à la négociation dans la Fonction Publique du 22 juin 2011) en ouvrir un vaste cycle de négociations à la DRFiP PACA 13.