Versailles, le 28 janvier 2020

Monsieur le Président du Comité Technique Local des Yvelines,

Le point principal de ce Comité Technique Local fait partie des récurrences annuelles au même titre que les feuilles d’automne s’accumulant sur les voies ferrées qui justifieraient les retards de trains. En cette période de vœux de nouvelle année, il ne sert à rien d’user de compliments à l’intention des agents de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) qui, lorsque l’on regarde la réalité, ne valent guère plus que des flagorneries Au mieux : un roman d’entreprise mais sûrement pas la réalité dont témoigne Solidaires Finances Publiques.

 

Pour commencer, les agents protestent contre la disparition de trésoreries un peu partout en France, disparition que dénoncent également de nombreuses communes. Sur plus de 3 500 trésoreries existantes encore aujourd’hui, plus d'un millier risquent de bientôt disparaître.

Depuis Paris, ces pertes de présence du Service Public passent inaperçues. Par contre les médias régionaux ont largement documenté ces disparitions. Nombre de communes s’est insurgé également contre cette politique. De Tonnerre (Yonne) à Saint-Antonin-Noble-Val (Tarn-et-Garonne), de Quimperlé (Finistère) à Villeneuve-les-Corbières (Aude), de nombreux conseils municipaux votent des motions pour dénoncer la réorganisation du réseau de la DGFiP qui en est plutôt le sabordage.

Les agents protestent contre la baisse du service rendu aux usagers. La dématérialisation n’est qu’un prétexte pour mieux supprimer des emplois car en réalité, la transformation du travail n’est pas prise en compte. Pour notre ministre, Gérald Darmanin, la suppression « d'environ 5 800 emplois sur trois années » est justifiée par le « prélèvement à la source » ou autres subterfuges sous couvert de suppressions de taxes pouvant « simplifier la vie des Français ».

Pour Solidaires Finances Publiques, ce discours n’est qu’une mascarade, une forfaiture. Les ministres successifs n'ont jamais voulu prendre en compte la transformation des missions ni la charge de travail qui n'a cessé de croître. Ils n’ont jamais eu une once de reconnaissance pour les agents. A titre d'exemple, entre 2012 et 2017, les sollicitations à l'accueil ont augmenté de 39 %. La dématérialisation, si « légère en volume de travail », c'est 15 millions de sollicitations de visu chaque année et 32 millions au total (par téléphone et courriel en plus). C’est un mensonge que de vouloir faire croire que l’activité des Services Impôts des Particuliers se résume à la saisie de déclarations des revenus papier.

En aucune façon le service rendu par les « points de contact" ou par les Maisons France Services (MFS), qui doivent remplacer les trésoreries, sera d’aussi bonne qualité. Ces Maisons ne remplaceront en aucun cas les Centres des Finances Publiques, puisqu’elles ne seront pas dotées de techniciens des impôts. Il est donc prévu que des agents de la DGFiP s’y déplacent pour assurer des permanences. Mais avec la charge de travail qu’ils supportent déjà et les effectifs en continuelle diminution, on se demande bien comment ils pourraient aller passer une demi-journée ou plus dans les villes et villages.

Cette organisation mélange l’évolution du réseau propre à la DGFiP et celle de structures légères, généralistes. Selon les diverses conventions qui ont été signées entre des Directions Régionales et des communautés de communes, il en ressort que :

  • un accueil généraliste sera assuré par les agents de la Maison de Service Au Public (MSAP), préalablement formés par la DGFiP. Ils seront chargés de donner des informations générales sur les démarches fiscales ou le paiement de créances locales, de faciliter les démarches en ligne sur les sites internet relevant de la DGFiP, d’accompagner la déclaration en ligne, de donner des informations générales sur les impôts locaux et leurs paiements. Ils seront chargés également de renseigner les « quidams » sur les modalités de dépôt pour une réclamation contentieuse, pour un changement de situation, pour l’achat de timbres fiscaux, pour le paiement en ligne des impôts, des produits locaux, de produits hospitaliers et amendes. Ils devront renseigner sur une demande de remise gracieuse ou sur des délais de paiement. Mais ils seront aussi chargés d’indiquer comment obtenir un bordereau de situation fiscale ou donner des informations sur la procédure de surendettement ;

  • les agents des MSAP pourront s’appuyer sur un réseau de référents dans les services spécialisés de la DGFiP qu’ils solliciteront autant que de besoin par téléphone ou par courriel sur les questions des usagers auxquelles ils n’auront pu répondre ;

  • pour les questions complexes, heureusement, un accueil sur rendez-vous avec un agent du service compétent de la DGFiP sera mis en place, par téléphone, visio-téléphone ou en présentiel.

Il faut noter, tout de même, que les agents d’accueil seront sensibilisés sur les règles du secret professionnel et du secret fiscal et qu’ils s’engageront à les respecter … De plus, ces agents, au statut non précisé, seront censés également assurer un accueil de premier niveau pour la Caisse d’Allocation Familiale, les Caisses Nationales d’Assurance Vieillesses et Maladie, Pôle Emploi, la Poste, les ministères du travail, de l’intérieur, de la justice, etc. Souvenons-nous du slogan « on trouve de tout à la Samaritaine » et rappelons-nous que ce grand magasin parisien a brutalement fermé pour cause de faillite.

Il faudra donc trouver des personnes poli-compétentes, polyvalentes, et surtout volontaires pour cet emploi. Solidaires Finances Publiques souhaite bien du courage aux « Super-agents » qui assureront cet accueil, dont ni le recrutement, ni le statut, ni la rémunération, ni la carrière ne sont évoqués.

Solidaires Finances Publiques tient à rappeler que ce projet comporte donc de multiples dangers. De fait, cette désorganisation prétendue réorganisation se traduira par une désertification accrue des services de l’État en zone rurale et par un accompagnement incertain au quotidien des élus locaux. Elle va accroître le sentiment d’abandon et décevoir la population qui réalisera que les MFS ne peuvent remplacer un service public technicien. Ainsi, nos concitoyens devront effectuer des trajets plus longs, entraînant un coût financier et environnemental non pris en compte à ce stade du projet, subir plus de délais d’attente ou devront se débrouiller par eux-mêmes avec internet alors qu’il existe encore de nombreuses « Zones Blanches » dans les territoires ruraux pour internet ou le téléphone portable.

L’économie locale sera par conséquent touchée par le désengagement de l’État. Pourtant, le Président de la République, pour répondre à la crise des «Gilets Jaunes », s’était engagé à revitaliser les « Territoires » français, entre autre par le maintien du service public.

Encore une énième réforme de l’administration tendant vers le démantèlement et la privatisation de ses missions régaliennes : les tâches confiées aux buralistes. A partir du 20 février 2020, les usagers pourront en effet régler leurs impôts, leurs amendes, mais aussi leurs factures de services publics (crèche, cantine, hôpital) dans les bureaux de tabac, en espèces (dans la limite de 300 €) ou par carte bancaire. Bien que ces commerçants soient soumis au secret professionnel, où se trouve la confidentialité des démarches au milieu des ventes de boissons, de tabac ou de jeux de hasard ?

Mais s’il n’y avait que ça … Maintenant, la question des retraites est au cœur des débats depuis des semaines, car il est question que la pension soit la résultante des contraintes économiques et démographiques.

Même si le gouvernement a accepté de retirer provisoirement le mécanisme de l'âge Pivot pour les départs en retraite avant 2027, ce point serait bien fondamental pour le futur régime universel. Si cette mesure vient à être mise en œuvre par ordonnance, rien ne devrait empêcher de ne pas respecter l’âge pivot pour partir plus tôt mais à la condition que la pension soit réduite (10 % pour 2 ans, 15 % pour 3 ans ). A contrario, si un agent décide de partir après cet âge pivot, il pourra bénéficier d’une majoration de sa pension de 10 %. Ces mesures veulent inciter le salarié à devoir accepter de travailler plus longtemps alors que 8 % de la population active est à la recherche d’un emploi (moyenne annuelle en 2019 selon l'INSEE) et que les salariés de plus de 55 ans dans le privé sont poussés vers la sortie.

Aussi, en prenant en compte non plus les 25 meilleures années de travail dans le secteur privé ou les 6 derniers mois pour les fonctionnaires, mais toute la carrière, la réforme des retraites occulte nombre de situations où la personne n’a pu travailler pour raison de famille, période de chômage ou carrière hachée. En conséquence, il en résulte une perte de points acquis et donc, une pension amoindrie.

Pour ces raisons, Solidaires Finances Publiques exige :

  • la suppression du système de retraite à points,

  • le maintien du système par répartition,

  • le maintien du code des pensions civiles ou militaires,

  • le départ en retraite à 60 ans,

  • un taux de remplacement de 75 % des 10 meilleures années dans le privé et le maintien de la règle des 6 derniers mois dans les Fonctions Publiques

  • aucune hausse de la durée de cotisation,

  • aucune pension de retraite nette en dessous du SMIC,

  • la fin du gel des pensions,

  • une revalorisation annuelle des pensions au minimum égale à l’inflation,

  • le maintien et l’amélioration des pensions de réversion, au même taux que celle versée par l’Assemblée Nationale (55 %) ou par les instances européennes (60 %).

  • pour le calcul de l’impôt sur le revenu, le rétablissement de la 1/2 part supplémentaire pour les personnes vivant seules et ayant élevé au moins un enfant.

  • L’abandon du plafond de verre de 14 % du PIB pour les retraites,

  • l’égalité réelle des salaires pour les femmes ainsi qu’une réelle lutte contre le chômage et la précarité qui entraîneraient plus de cotisations sociales pour la santé et les retraites.

Et comme si la volonté gouvernementale des atteintes à la solidarité intergénérationnelle ne suffisaient pas, voici venu le temps de la dé-métropolisation. Le quatrième comité interministériel de la transformation publique s’est tenu le 15 novembre 2019. Il a levé un coin du voile qui recouvre pudiquement la liste des services qui devront quitter Paris ou des métropoles régionales pour des communes rurales ou péri-urbaines. Des services d’Île-de-France et de métropoles régionales devraient être délocalisés (soit environ 3000 agents ?), d’une façon progressive sur une période de 6 ans, de 2021 à 2025. Aucune mutation ne devrait être forcée car l’administration compte sur « l’érosion naturelle », mutations et départs à la retraite. Solidaires Finances Publiques ne manquera pas de veiller à connaître la liste des communes bénéficiaires.

Notre ministre ose affirmer que « la majorité des agents ne fait pas grève, car elle adhère à son projet ». En réponse, Solidaires Finances Publiques rappelle que si les agents des Finances Publiques disposeraient de la capacité financière de se mettre autant en grève que d’autres corps de métier, cela se saurait. D’où l’initiative de la « Votation Nationale » qui a permis de prendre l’avis des Agents sans que cela ne pèse sur leurs finances. Bien que régulièrement freinée, la participation est comprise entre 60 et 90 % sur tout le territoire et les résultats sont nets et massifs : en moyenne, 95 % des participants rejettent le plan des pouvoirs publics ... Autant que de plus en plus d’élus et de citoyens. C’est une réalité qui s’installe maintenant dans la durée. L’abandon de ce plan visant à déstructurer le réseau territorial et à transférer certains services est plus que jamais nécessaire comme l’ouverture de véritables négociations. La priorité doit aller au renforcement du Service Public et des moyens de la DGFiP notamment.

Pour Solidaires Finances Publiques, la politique de suppression d’emploi s’apparente à un "plan social déguisé" quand l'on sait que le Président de la République a programmé 50 000 suppressions d’emplois dans la Fonction Publique d’État. Il n’en demeure pas moins que notre administration a déjà essuyé le plus de suppression d’emploi, à raison d’une moyenne de 2 000 emplois par an, soit un honorable et suffisant total de 30 000 à 40 000 emplois disparus depuis 15 ans, équivalent à environ 20% des effectifs existant lors de la fusion trésor-impôts. Là encore, on peut dire que la DGFiP est aussi à la pointe en tant que premier contributeur en nombre d’emplois rendus.

Solidaires Finances Publiques dénonce cette politique de suppression d’emplois aveugle et en totale inadéquation avec la réalité professionnelle des agents et les nécessités de la justice fiscale. D'autant plus que sur un plan personnel, comment peut-on se projeter lorsque l’on s'attend, chaque année, à devoir encore muter avec la contrainte de rouler plus de kilomètres, voire de déménager ?

En conclusion, Solidaires Finances Publique s’oppose à ce projet de suppression d’emplois qui nuit tant à la DGFiP qu’aux agents. En cette période de vœux, Solidaires Finances Publiques fait le vœu d'avoir enfin les moyens humains et budgétaire pour assurer un véritable service public à la hauteur des attentes et des droits des citoyens et des besoins de justice fiscale pour une démocratie digne de ce nom.

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