Les agents -et organisations syndicales- de la DDFIP de l’Isère ont pu prendre connaissance le 11 mars dernier du calendrier prévisionnel 2023 des opérations liées à la mise en place du mal nommé « Nouveau réseau de proximité » (NRP).
M. Philippe LERAY entend ainsi (par)achever le réseau DGFIP sur le territoire départemental avant, comme il l'a annoncé en CHS-CT, son départ en retraite début 2024.
Depuis 2019, la DGFIP aura profité de la crise sanitaire pour maintenir le CAP. Manifestement, adresser aux agents des messages de remerciements pour leur engagement au service de nos concitoyens est une chose, tenir compte de leurs difficultés en est une autre.
SPL : DU SANG ET DES LARMES
Le calendrier consacre la disparition de ce qu’il restait des Trésoreries de Domène, La Verpillère, Meylan, Pont de Beauvoisin, Saint-Égrève, Tullins, Vinay au 1er janvier 2023, des Trésoreries des Abrets, Crémieu, La Côte-Saint-André, Morestel, Pont-de-Chéruy, Saint-Étienne-de-Saint Geoirs au 1er septembre 2023. En bref, il s’agit de l’aboutissement d’un long et pénible jeu de massacre au détriment des usagers et des agents.
Les missions hospitalières seront concentrées sur deux sites, Bourgoin-Jallieu (Nord-Isère) et La Tronche (Sud-Isère). Toujours plus loin... avec toujours moins...
La séparation entre les missions des Services de Gestion Comptable (SGC) et des Conseillers aux Décideurs Locaux (CDL) va creuser un fossé entre le conseiller et le comptable et accentue la volonté de certaines collectivités de se passer de la DGFiP pour assurer ces missions. Les experts-comptables sont aux aguets !
Par ailleurs, cette logique de taylorisation n'améliore en rien les conditions de travail des agents. Ni la qualité, ni l'intérêt du travail ne s'en trouvent renforcés. Les difficultés des comptables pour exercer l’ensemble de leurs missions (notamment assurer conjointement la gestion et le conseil) résultent de la concentration des budgets, elle-même fruit des suppressions de trésoreries et des restructurations menées depuis plus de quinze ans, par l’administration elle-même. Comme à son habitude, la DGFIP excelle dans le rôle du pompier pyromane. Après avoir initié les réformes de structure (ASR) à l’origine des dysfonctionnements actuels, elle prétend tout régler avec une énième réforme pire que les précédentes !
MATIÈRE FISCALE : RÉSEAU DÉTENDU
Au 1er janvier 2023 disparaîtraient aussi les SIP de La Côte-Saint-André, La Tour-du-Pin, L’Isle-d’Abeau ainsi que les SIE de Bourgoin-Jallieu, Saint-Marcellin, L’Isle-d’Abeau et Voiron (avec maintien d’une antenne provisoire sur ces deux derniers sites).
Après la fusion des Pôles de Contrôle et d’Expertise du Sud-Isère programmée au 1er septembre 2022 (et, dans le cas du PCE Sud-Isère 1, une baisse des effectifs de plus de 41% depuis 2015), ce serait au tour du Nord-Isère d'être regroupé dans un unique PCE, avec à la clef un jeu de chamboule-tout (concomitant d’un nouveau rééquilibrage des PCE sous-dotés en emploi ?) dans un contexte détérioré par la crise sanitaire (missions liées aux aides COVID).
« LES DEVOIRS VALENT AVANT LES DROITS » ?
Le NRP est un outil pour s’adapter aux baisses budgétaires et réduction d’effectifs constantes (un tiers des effectifs perdu en vingt ans !) en regroupant les missions et structures, pour modifier les méthodes et la division du travail au sein de la DGFIP, avec comme objectif la volonté de casser les chaînes et les collectifs de travail.
La numérisation à marche forcée de l’accès aux services publics s'intègre dans ce processus. Loin d’être une simplification pour les usagers, elle constitue « une forme de maltraitance institutionnelle » (rapport du défenseur des droits). Rappelons que 13 millions de personnes galèrent avec le numérique, soit un usager sur cinq.
Les personnes déjà en situation de précarité sociale voient chaque jour rendu plus difficile l’accès à leurs droits, à leurs prestations, aux services publics.
La crise sanitaire a accéléré la dématérialisation des procédures, des échanges, le recours au télétravail, l’école à distance, à la prise de rendez-vous médicaux/vaccinaux en ligne, et ainsi accru la relégation technologique et sociale des populations défavorisées.
À l'instar du Défenseur des droits, Solidaires Finances Publiques rappelle que nul ne peut être privé de ses droits et prestations au motif qu'il ne recourt pas au numérique lors de ses échanges avec l'administration. La vraie réforme dont la fonction publique a besoin est celle qui la mettra à l’abri des puissances de l’argent qui veulent détourner ses missions à son profit.
RPS À TOUS LES ÉTAGES
Les agents de la DGFIP sont mis sous pression sur le plan professionnel depuis des années de par les restructurations incessantes qu’ils ont dû mettre en œuvre. Les agents dont les structures ferment vont devoir dans le meilleur des cas changer d’affectation et, par conséquent, dans la grande majorité encore plus se déplacer pour se rendre sur leur nouveau lieu de travail : des dépenses de carburant et des risques routiers accrus pour beaucoup.
Comment l’administration peut-elle encore affirmer que l’industrialisation de certaines tâches conduit à un meilleur environnement de travail pour les agentes et les agents ?!
Comment la perte de sens du travail et des missions peut-elle conduire à de meilleures conditions de travail ?!
Alors que tous les guides en la matière, reconnus par l’administration, démontrent que de tels procédés ne conduisent qu’à une chose : générer des risques psycho-sociaux (RPS) !
À cela s’ajoutent les RPS liés aux conflits de valeurs ou à la qualité empêchée, risques vécus par les personnels qui ne disposent plus des moyens de réaliser un travail de qualité dans le respect de la législation, avec la perte des repères communs... et l’insécurité de la situation au travail : le NRP couplé avec la loi de transformation de la fonction publique ne peut qu’inquiéter les agentes et les agents quant à leur avenir professionnel et personnel.
Bref, le NRP est un dynamitage du réseau de la DGFIP qui fait prendre de bien grands risques aux personnels qui vont devoir la subir. Rappelons tout de même au Ministre, au Directeur Général ainsi qu’au Directeur départemental qu’ils sont tous pénalement responsables si par malheur il devait arriver quelque chose aux agents dont ils ont la responsabilité.
Solidaires Finances Publiques ne manquera pas de le rappeler autant de fois que nécessaire afin de dénoncer la détresse psychique et physique des personnels de la DGFIP. Nous invitons à cette fin les agents à se saisir des outils comme les réunions « conditions de vie au travail – risques professionnels » de l’actuelle campagne DUERP.
Malgré tout, le printemps arrive. Cela peut paraître presque incongru tant les médias entretiennent un climat d'angoisse et de peur. Il ne s'agit pas de dire, et encore moins de croire, que les choses vont bien et que les lendemains qui chantent sont à portée de main. Non. Mais, en revanche, relativiser (« faire perdre son caractère absolu à quelque chose, en le mettant en relation avec quelque chose d'analogue ou avec un ensemble ») les événements, cela ne veut pas dire les sous-estimer. Et combattre la peur et la résignation plus encore, des perspectives existent.
L’appel pour un Printemps des services publics s'inscrit dans cette volonté d'unir agents, usagers et élus locaux pour la reconquête des services publics de proximité.