Les actions et blocages en cours sur une partie du territoire révèlent le malaise profond qui traverse le monde agricole. Il est principalement lié aux difficultés qu’ont les agricultrices et agriculteurs à vivre décemment de leur travail. Comment cela est-il possible alors que les prix en magasin des produits alimentaires ont augmenté fortement ces dernières années, prenant toujours plus de part de nos salaires, surtout pour les bas revenus ?
Cette situation est la conséquence directe du modèle de développement ultra-libéral mené par la France et l’Union Européenne centré sur l'industrie agro-alimentaire et la grande distribution qui dégagent de grosses marges et accentuent l’inflation. Et ce sont les agricultrices et agriculteurs,captifs et captives de ce système concurrentiel, qui doivent produire toujours plus pour survivre en remboursant les emprunts de financement (matériel, terres…) dans un cercle infernal qui mène de trop nombreuses fois au suicide. Cela renforce la pression sur l'utilisation de produits chimiques. Tout cela accélère également la diminution du nombre d'exploitations agricoles et l’accaparement des terres, notamment par de grands groupes et multinationales tels que LVMH.
La production agricole est dès lors vue comme un « business comme un autre ». Dans ce modèle inégalitaire, des gros patrons et des actionnaires se gavent, en particulier de subventions, pendant que des petits triment et meurent. En France, les gouvernements se suivent et renforcent ce système qui marche sur la tête : la destruction et l’appauvrissement ici provoque la destruction de l’agriculture dans les pays les plus pauvres accélérant exodes ruraux et migrations par le jeu des exportations dans le monde entier de produits à bas coûts, car subventionnés.
La mobilisation actuelle, qui existe également en Europe (Pologne, Allemagne, Pays-Bas…) et qui va peut-être s’étendre, révèle l’impasse de ce mode de production capitaliste. Si le gouvernement a peur et laisse totalement faire les blocages et dégradations, là où les militant.es des mouvement sociaux et écologistes sont habituellement violemment réprimés, c’est pour la place particulière des paysan·ne·s dans notre société, par le poids des lobbys patronaux comme la FNSEA et la construction de clientèles électorales. Les réponses populistes qui risquent d'être apportées contre « les normes environnementales » par exemple, du gouvernement à l’extrême-droite, ne feraient qu'accentuer la fuite en avant.
Au contraire, il faut prendre des mesures pour que les paysan·ne·s puissent vivre correctement : aucun produit agricole ne doit pouvoir être acheté en dessous de son prix de production. La façon dont est élaborée la nourriture, l’impact sur les populations et sur l'environnement doit être pris en compte. Il est même possible de créer de nouveaux droits.. Notre Union questionnera la sécurité sociale de l’accès à l’alimentation pour la population lors de son prochain congrès.
Pour l’Union syndicale Solidaires il faut sortir des traités internationaux de libre échange qui détruisent l’agriculture paysanne. C’est l’enjeu de la relocalisation en France des productions agricoles avec le maintien d’une agriculture paysanne plus sobre en transport et intrants. Nous pouvons changer de modèle et aller vers la création de centaines de milliers d'emplois dans le monde paysan, tout en répondant aux enjeux environnementaux majeurs.
Avec l’Alliance Écologique et Sociale, Solidaires porte notamment l’idée de construire une véritable démocratie agricole et alimentaire transparente, de gagner le même droit pour tou-te-s à une alimentation saine et de qualité tout en renforçant la souveraineté alimentaire.